Culture






Je n'ai pas donné à mes sols leur temps de repos
Pas abondé dans la jachère
J'ai labouré
Aux interférences
Je n'ai pas laissé leur part de vie secrète
Il n'y a pas eu de renouvellement des éléments
Pas de travail discret des créatures
La faune acénique a dû être déportée
Je n'entends plus son murmure
Je n'entends plus rien

Que le souffle un peu court de mon zèle
J'ai labouré
Retourné de l'aube au crépuscule mon petit lopin
La nuit, veillant
Penchée sur l'éclat des lunes au fond des sillons
C'est un terrain pentu
Une sorte de fausse route
La terre y est à nu sous les pluies diluviennes
Elle dégorge
Ses entrailles presque palpables sous l'érosion
L'humus s'est décomposé
J'ai perdu jusqu'à l'idée d'ensemencer
Quand les pluies disparaissent
La terre en quelques heures
Se dessèche sous les soleils musqués
Elle craque sous mes doigts
J'ai labouré en fendant sans répit les flancs de cette glèbe
Toujours identique
Sans rien planter, rien épandre
Dormant peu
Attentive à la marche des instruments aratoires
Qui pouvaient me décapiter
Je vois, je vois bien
Que rien ne pousse
Que ce travail de bœuf est vain
Il y manque la main de la semeuse
Sa foi naïve en  la persistance

 



 
Mai 2016